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Pièce nº Rey17530219

Type Lettre
Identifiant Rey17530219
Date de composition 1753-02-19
Certitude sur la date haute
Date de réception /
Expéditeur Luzac, Elie
Destinataire Rey, Marc Michel
Lieu d'envoi Leyde
Lieu de réception Amsterdam
Adresse oui
Lieu de conservation Amsterdam, UB, Bibliotheek der Vereeniging tot Bevordering van de Belangen des Boekhandels
Cote Bre 2-35
Cote (copie) /
Imprimé /
Edition /
Autographe oui
Signature oui
Renvois /
Incipit Je crois que quand on l’on est accusé
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Leyde, 19 février 1753

Monsieur,

Je crois que quand l’on est accusé on peut exiger de celui qui accuse preuve de l’accusation. Vous m’avez accusé de vous avoir dit des injures ou de vous avoir injurié1 ; je demande que vous me le prouviez ; cela est-il déraisonnable ? Aujourd’hui vous me dites2 « la facon dont vous en avez agi avec moi au sujet des Ecrits pour et contre3 , votre lettre par laquelle vous me disiez que vous ne vouliez plus rien avoir à faire avec moi, et quelques autres articles m’ont donné lieu de croire et de me persuader que c’est m’ofenser en demandant des choses injustes, et en vous exprimant d’une façon peu obligeante ». 1e. Vous faites entendre dans ce passage que la façon avec laquelle j’en ai agi touchant les Ecrits n’a pas été equitable : 2e. que ma lettre dont vous faites mention étoit offensante : 3e. qu’il ÿ a encore d’autres articles à ma charge et 4e. vous avancez que je vous ai demandé des choses injustes. Est-il permis, Monsieur, de faire ces imputations sans en donner raison, et de bonne foi pouvez-vous exiger que je me les voÿe faire sans temoigner du mecontentement. Tandis que vous en agissez de cette manière, je me borne à demander des preuves ; et à remettre la liquidation de notre compte jusques à ce que vous me les aÿiez données, parce que si vos plaintes sont fondées [2] je veux vous rendre justice ; si elles ne le sont pas c’est à vous à me la rendre. En attendant, Monsieur, je vous dirai que je ne conçois pas encore comment vous pouvez trouver mauvais que j’aÿe exigé de vous que vous tinssiez parole touchant les Ecrits. Ce marché dites-vous tourne à votre desavantage, mais cela donne-t-il le droit d’en desister ? Où trouvez-vous que cela oblige celui qui l’a fait avec vous à ÿ renoncer ? De quoi vous plaignez-vous donc, et quel tort vous ai-je fait ? Je vous ai presenté et vous offre encore de reprendre autant en exemplaires des Ecrits qu’il m’en reste en Portefeuille de Rousseau 4 et Vie du Petit Pompée5 . Mon Caractère ne me permet aucune un mot raturé rancune ; mais mon aversion pour les tracasseries m’eloigne de tout ce qui peut ÿ donner lieu ; et comme ce n’est pas la première fois que nous avons du desagrement ensemble, j’estime qu’il vaut mieux et pour vous et pour moi que nous n’ÿ soÿions plus exposé. C’est par cette raison que je vous ai dit que je ne me souciais pas d’avoir des affaires avec vous6. À cet egard nous sommes libres et l’un et l’autre ; il n’ÿ a là aucun sujet d’offense.

Je Vous enverrai par 1e. occasion

1 Defense de l’Appel A7

6 Defense8

1 Philosophe Chret. Tom.1er.9

Quand vous me demanderez 12 exemplaires à la fois, j’ÿ ajouterai toujours le 13e.

[3] J’ai l’honneur d’être / Monsieur / Votre très humble et obeissant serviteur

Elias Luzac junior

Leyden 19 fev. 1753.

Monsieur / Monsieur Reÿ / à / Amsterdam

Leyden 14. fevr. 1753. / Luzac

Notes

1 Luzac s’indigne de ces accusations de la part de Rey depuis le mois de novembre 1752, dans un climat de plus en plus orageux entre les deux libraires. Voir Rey17521116 et Rey17530207 .

2 Cette lettre de Rey ne nous est pas parvenue.

3 Écrits pour et contre les Immunités prétendues par le Clergé de France (La Haye, [Elie Luzac], 1751-1752, 8°, 7 vol.) qui contient diverses « Lettres supprimées ». Rey en avait renvoyé cent exemplaires sur les deux cents reçus des premiers volumes et Luzac lui rappelait son engagement de prendre cent exemplaires des volumes suivants ( Rey17510308 , Rey17521116 , Rey17521013 ). Par ailleurs, cet ouvrage est l’objet d’une querelle sur le prix d’achat depuis près de deux ans. Voir Rey17510308 , Rey17510430 , Rey17510806 .

4 [Jean-Baptiste Rousseau],Portefeuille de J. B. Rousseau. Contenant diverses pièces de vers et de prose, à lui adressées directement et autres qu'il avait recueillies (Amsterdam, Marc Michel Rey, 1751, 2 vol., 12°). Le prix de cet ouvrage est l’objet d’une querelle entre les libraires depuis 1751 également. Voir Rey17510430 , Rey17520121 et Rey17520124 .

5 [Francis Coventry], La Vie et les aventures du Petit Pompée. Histoire critique. Traduite de l'Anglois par M. Toussaint (Amsterdam, M.M. Rey, 1752, 12°, 2 vol.). Voir Rey17520121 note 8 pour le détail de cette édition. Dans cette dernière lettre, Luzac demandait un exemplaire avant de se déterminer à en commander davantage.

6 Les relations sont tendues entre les deux libraires depuis le début de l’année 1752. Luzac fait peut-être allusion à ce qu’il écrivait le 13 octobre 1752 : « J’aime mieux finir pour jamais mon commerce avec vous, puisque vous êtes le seul avec qui je le fais avec desagrement et je quiterois dabord ce commerce si je devois le faire de cette manière. » ( Rey17521013 ).

7 [Samuel König] Défense de l’appel au public ou Réponse aux lettres concernant le Jugement de l’Académie de Berlin, adressée à Mr de Maupertuis par Mr Koenig (Leyde, Elie Luzac fils, 1753, 8°). Cet ouvrage s’inscrit dans la polémique qui oppose Maupertuis, président de l’Académie des sciences de Berlin et Samuel König, professeur de philosophie et de mathématiques depuis 1751. Maupertuis avait présenté une conférence à l’Académie des sciences en 1746 sur « Les Lois du mouvement et du repos déduites d’un principe métaphysique », au fondement de son Essai de cosmologie (Berlin [Bâle], 1750, 8°, réed. E. Luzac, 1751, 8°). König publie en mars 1751 dans le périodique Nova Acta éditorum un article rendant compte de l’existence de lettres de Leibniz attestant que ce dernier avait développé le principe de la moindre action avant Maupertuis. Maupertuis ne parvient pas à voir les lettres de Leibniz et réunit l’Académie des sciences en séance exceptionnelle pour qu’elle se prononce sur ce différend. L’Académie vote en faveur de Maupertuis. König publie alors un Appel au public du jugement de l’Académie royale de Berlin, sur un fragment de lettre de Leibniz cité par Mr. Koenig (Leyde, Elie Luzac junior, 1753, 8°) contenant une copie des lettres de Leibniz et la correspondance avec Formey et Maupertuis. Voltaire prend parti contre Maupertuis dans la querelle. Luzac publie une compilation des textes autour de ce différend intitulé Maupertuisiana (Hambourg [Leyde, Elie Luzac], 1753, 8°), voir Rey17530611 . Sur cette querelle, voir R. van Vliet, Elie Luzac, Bookseller of the Enligthenment, AFdH Publishers, 2014, p. 45-53. Jean-Jacques Samueli et Alexandre Moati, « Euler en défense de Maupertuis à propos du principe de moindre action », Bibnum [En ligne], Physique, mis en ligne le 01 mai 2012, consulté le 28 décembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/bibnum/797.

8 Il peut s’agir de Montesquieu, Défense de l’esprit des lois à laquelle on a joint quelques éclaircissements, (Genève, Barillot et fils, 1750, 12°) dont Luzac publie un extrait dans la Bibliothèque impartiale en 1750 (Lettre de Luzac à Formey, 11 juin 1750, Lettres d’Elie Luzac à Jean Henri Samuel Formey (1748-1770), éd. Hans Bots et J. Schillings, Champion, 2001, p.122). Ou peut-être de Emer de Vattel, Défense du système leibnitien contre les objections et les imputations de M. de Crousaz, contenues dans l’examen de l’Essai sur l’homme de M. Pope (Leyde, Jean Luzac, 1741, 12°) de nouveau d’actualité avec la polémique entre König et Maupertuis.

9 [Samuel Formey], Le Philosophe chrétien ou Discours moraux par M. Formey (Leyde, Elie Luzac, 1750, 12°). Luzac en a imprimé le premier volume à l’automne 1750 et en prévoit une édition corrigée avec l’ajout d’un second volume dès le printemps 1751. Voir les lettres de Luzac à Formey du 9 avril 1751 et 15 mai 1751, Lettres d’Elie Luzac à Jean Henri Samuel Formey (1748-1770), p.172 et p.179 ; voir Rey17510724 , Rey17510806 . Cette seconde édition paraît au printemps 1752 sous le titre Le Philosophe chrétien par Mr Formey, seconde édition revue et augmentée (Leyde, Elie Luzac, 1752, 12°). L'ouvrage comportera finalement quatre tomes (1750-1757).