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Pièce nº Rey17730617a

Type Lettre
Identifiant Rey17730617a
Date de composition 1773-06-17
Certitude sur la date haute
Date de réception 1773-06-22
Expéditeur Éon, Charles de Beaumont d’
Destinataire Rey, Marc Michel
Lieu d'envoi Londres
Lieu de réception Amsterdam
Adresse /
Lieu de conservation Tonnerre, Médiathèque Ernest Cœurderoy
Cote T22
Cote (copie) /
Imprimé /
Edition /
Autographe oui
Signature oui
Renvois /
Incipit J’ai reçu, Monsieur, par la derniere poste
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Mr. Michel Rey / à Amsterdam

A Londres le 17 juin 1773

J'ai reçu, Monsieur, par la dere poste  la la lettre  votre lettre du 11 de ce mois1, javoue et confesse que vous avez de bonnes raisons pour temoigner de l'impatience sur la reception du der volume2; mais avant de vous decouvrir les veritables raisons de ce retard, j'ai l'honneur de vous prévenir que mardi prochain3 sans faute je ferai mettre à votre adresse à la grande poste de Londres le Mpt du 12e vol. couvert d'une petite toile cirée +. +  & cachetée  que vous aurez la bonté de faire retirer il sera  scelle  fiscellé et scellé du même cachet que la presente lettre; et  inscrit sur le livre de la grde poste  a il ny manque qu'une cinquantaine de pages pour completer le vol., mais vous les recevrez dans peu par un autre paquet  bien avant  et par le même canal.

Il ne s'est point trouvé de capitaine prest à partir pour Amsterdam. Souvent  il sen  plusieurs disent qu'ils vont partir et restent encore un mois sur la Tamise. Comme vous êtes pressé de recevoir ce paquet j'ai cru devoir préferer la poste comme la voïe la plus seure et la plus prompte.

Mr Vignoles ma assuré avant hier n'avoir point reçu votre lettre du 5 May dernier4; il est vrai qu'il a quitté dépuis deux mois la maison qu'il occupoit à l'extremité de la ville5 pour se raprocher de la cité. et  la personne qui avoit pris la maison etant venu à mourir alasuite de l'operation de la taille6 la maison est restée sans maitre et sans domestiques. Dans ces circonstances votre lettre sera arrivée et le facteur l'aura sans doute raportée à la grande poste où il doit l'aller demander.

Il faut apresent vous confier, Monsieur, que les veritables raisons du retard que vous avez eprouvé proviennent

1°. d'un petit procés que j'ai eu avec l'imprimeur des 4. premiers volumes7 et que nous avons soumis enfinb à l'arbitrage de trois bons et honnetes avocats.

[2] Dépuis 15 mois j'ai été en negociation pour mon retour prochain en France; M. le Duc d'Aiguillon 8 m'en  a ayant c fait accorder la permission du Roi avec un traitement seur et honnete, & aussi seur qu'il est possible à un particulier d'assurer sa liberté contre le pouvoir Monarchique despotique des Ministres. d

la seule difficulté qui me retient ici encore ici la principale difficulté qui me retient encore ici est le paiement de ce qui m'est légitimement deut depuis si long tems par la Cour. Si on me paye seulement la moitié à present je n'hésiterai pas à partir mais si on ne veut pas m'envoyer d'argent en Angleterre il m'est impossible de la quitter à cause des engagemens / parce que ma position m'a forcé à contracter des dettes que l'honneur me contraint également à payer9. Mes créanciers sont des Anglois que ceux qui peu édifiés de l'archarnement avec lequel on paroissoit travailler à m'acquitter / bien voulut par le préjugé national depuis 1769 ne négliger aucun moyen de me mettre en état de soutenir M. mon cousin jusqu'à la mort et moi-même jusqu'à présent avec la decence qui sans superfluité convenoit à notre état. e

Aussi vous voïez d'apres cela que, si vous avez essuïé quelques retards, vous ne pouvez les attribuer qu'à la necessite d'une part et de l'autre à un evenement peu prevu qui en me remettant dans ma patrie ne deviendra que plus favorables à votre Edition.  Une grace aussi singuliere me rendra une personne considerable / nouvelle ce qui J'espere que mon retour10 f influera sur tous mes ouvrages, et la piece que je prepare pour  republie terminer ce douzieme volume 11 g le previendra favorablement pour ce que nous pourions entreprendre p our par h la suite.

Notes sur le manuscrit

a Passage écrit dans la marge.

b Mot écrit dans la marge.

c Mot écrit au-dessus de la ligne.

d Passage écrit dans la marge.

e Passage raturé.

f Passage écrit au-dessus de la ligne.

g Passage écrit au-dessus de la ligne.

h Ecrit au-dessus de la ligne.

Notes

1 Rey17730611.

2 Depuis février 1772, Rey attend la livraison du manuscrit du 12e volume des Loisirs (Rey17720814, Rey17720904) et perd patience. Ce volume est consacré au « Détail Général de toutes les parties des Finances du royaume de France, avec des Observations politiques et intéressantes tant sur la multiplicité des impôts que sur l’administration et la régie des finances de ce royaume ».

3 Le mardi 22 juin 1773, voir Rey17730622.

4 Cette lettre ne nous est pas parvenue.

5 À la date du contrat, De Vignoles réside à Portland Row (Rey17710928b).

6 « Opération de la taille » ou lithotomie, opération qui avait pour but de fragmenter chirurgicalement un calcul logé dans le système urinaire.

7 En 1770, parurent les deux premiers tomes des Loisirs du chevalier d'Éon en Angleterre, sur divers sujets importans de tactique, politique, critique, ... (Londres, [1770], 8°, 2 t.), chez Thomas Becket et Peter Abraham de Hondt. Cette édition est mentionnée dans le volume 43 de septembre 1770 de The Monthly Review Or Literary Journal, p. 237: « The chevalier d’Eon proposes that his work should extend to, at least, twelve volumes ; […] The two volumes, which he has now presented to the public, contain a description of Poland, and the researches which he has made concerning the Kingdoms of Naples and Sicily […]»; Voir aussi la recension qu’en fait Le Journal encyclopédique de novembre 1770, vol. VII, p. 470 et le Scots magazine de septembre 1770, catalogue of new books p. 497. Voir également Rey17740121. Nous ignorons la nature exacte du procès qui oppose Éon à son imprimeur Thomas Becket mais il s’agit sans doute d’un contentieux portant sur l’arrêt de la publication des Loisirs.

8 Protégé de Mme du Barry, favorite de Louis XV, Emmanuel-Armand de Vignerot du Plessis-Richelieu, duc d'Aiguillon (1720-1788), est appelé en 1771 au ministère des Affaires étrangères où il met en œuvre la politique voulue par Louis XV, après le renvoi de Choiseul qui souhaitait une revanche sur l'Angleterre. D'Aiguillon est l'homme de la paix, s'abstenant de protester lors du partage de la Pologne, il est aussi l'agent d'un rapprochement franco-britannique. En 1774, il est nommé pour quelques mois secrétaire d'État de la Guerre, tout en conservant les Affaires étrangères. La mort du roi, le 10 mai 1774 entraîne la chute du ministre avec celle de ses collègues du triumvirat, Terray et Maupeou. Dès 1770, Éon avait entamé des pourparlers pour son retour en France et obtenu le versement d’une pension de 12.000 livres par an.

9 En 1763, lorsqu’il assure à Londres la fonction d’ambassadeur par interim, Éon mène un train de vie fastueux, accumule les dettes dont Choiseul, le ministre des Affaires étrangères, finit par ne plus vouloir que l'on assume les dépenses. En 1773, même si la pension de 12.000 livres octroyée par Louis XV lui est versée régulièrement, il reste criblé de dettes.

10 Éon quittera Londres le 13 août 1777. Le 17 août, il se présentera à la Cour en capitaine de dragons. Une ordonnance sera prise le 27 août 1777 par le roi Louis XVI qui lui ordonnera « de quitter l'uniforme de dragons qu'elle continue à porter et de reprendre les habits de son sexe avec défense de paraître dans le royaume sous d'autres habillements que ceux convenables aux femmes ». Habillé par Rose Bertin aux frais de Marie-Antoinette, il sera présenté à la Cour en robe à panier et corset le 23 novembre 1777. Sur les conditions du retour en France de Éon, voir Rey17750705 et Rey17760430.

11 Il s’agit de la « Conclusion et opinion de l’auteur sur la paix. », Loisirs, vol. XII, p. 267 et suivantes, dans laquelle Éon réfute les accusations portées à son encontre par Samuel Musgrave (1732-1780). Musgrave, médécin et philologue anglais, avait allégué dans un pamphlet publié en septembre 1769 avoir des preuves qu’Éon avait versé des pots-de-vin à certains membres du gouvernement britannique pour faciliter la conclusion du traité de Paris (1763). Éon avait répondu à ces accusations dans une lettre publiée dans le Public Adversiter (septembre 1769) et Musgrave avait été convoqué devant la Chambre des communes en 1770, qui avait jugé que l'accusation n'était pas étayée. Cette réponse d’Éon figure dans les toutes dernières pages du volume XII.